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Bilan climatique 2024 dans le monde : des records de températures et des catastrophes naturelles en augmentation

Regis CREPET

Par Regis CREPET, météorologue
mis à jour le

Au niveau planétaire, cette année 2024 restera comme la plus chaude depuis le début des relevés avec la fameuse barre des +1,5°C au-dessus de l'époque pré-industrielle dépassés. Elle restera aussi l'année d'inondations dévastatrices, y compris dans des zones peu habituelles, ainsi qu'une année de forte activité cyclonique. Retour sur les principaux évènements climatiques de 2024.

Dans la lignée de 2023, 2024 figure dans le peloton de tête des années les plus chaudes au niveau planétaire, que ce soit pour les températures de l’air comme pour les températures océaniques.

Pour la première fois depuis le début des relevés, la barre des +1,5°C par rapport à l’ère préindustrielle (limite à long terme fixée par l’accord de Paris en 2015) a été dépassée. Cette année est également marquée par des phénomènes cycloniques relativement nombreux et très explosifs. La pluviométrie a présenté de nombreux excédents avec des intensités records au deuxième semestre, à l’image de la mousson africaine inondant de vastes zones du Sahel et du désert du Sahara.

1- Une année marquée par des anomalies chaudes records

2024 devrait être l'année la plus chaude depuis le début des relevés, surpassant les records de 2016 et 2020. Ce réchauffement spectaculaire reste difficile à expliquer, mais pourrait en partie être lié à l’éruption du volcan des Tonga en 2022 et à l’émergence d’El Niño. Une étude suggère également que la diminution des nuages océaniques pourrait réduire l’albédo et augmenter l’irradiance solaire, accentuant ainsi le réchauffement. Les températures océaniques ont maintenu des anomalies positives, bien qu'une légère baisse ait commencé cet automne, due à la diminution d'El Niño et à l'apparition d'une Nina dans l'Atlantique. Le MET Office estime que 2025 pourrait à nouveau figurer parmi les années les plus chaudes en raison de l'inertie thermique, notamment océanique.

2. Une année marquée par la fin progressive d’El Nino (avec une Nina atlantique atypique)

Les océans planétaires, excluant les zones polaires, présentent encore en 2024 des températures largement supérieures à la moyenne 1991/2020. Des vagues de chaleurs marines ont concerné l’Atlantique tropical, la Méditerranée et de vastes parties du Pacifique Nord.

En août, une baisse de la température de l’Atlantique tropical dans l’hémisphère sud, au large de l’Afrique, a intrigué car il s’agissait d’un phénomène moins connu et assez atypique : une « Nina » atlantique, un peu à l’image de celle du Pacifique, alors que les vents (en l’occurrence, les alizés) n’avaient pas changé de direction, contribuant à la difficulté de compréhension de ce phénomène.

Rappelons que l’océan Atlantique connait aussi des variations cycliques de températures (index AMO), à l’instar de l’océan Pacifique.

Dans l’océan Pacifique, le phénomène EL Nino a amplifié la période chaude à l’échelle planétaire. Le pic de réchauffement climatique de 2023/2024 serait en partie lié à El Nino, même si celui-ci ne permet pas d’expliquer le pic à +1,5°C à lui seul.

Fin 2024, une faible Nina a remplacé El Nino dans l’océan Pacifique, ce qui devrait contribuer à faire baisser légèrement la température planétaire globale, ce que l’on constate depuis cet automne.

3. Une année marquée par des ouragans aux rapides intensifications

La saison des ouragans 2024 dans l'Atlantique Nord a été particulièrement active, avec 11 ouragans, bien au-dessus de la moyenne de six. C'est la première saison supérieure à la moyenne depuis 2022 et la première à inclure un ouragan de catégorie 5 depuis 2019. Bien que loin des records de 2005, 2020 et 2021, elle se classe parmi les plus actives depuis 1988. Cette activité intense a été favorisée par des températures océaniques élevées et le phénomène La Niña. Les ouragans Béryl, Hélène et Milton se sont distingués par leur rapide intensification et leurs lourds bilans humains et matériels, avec des pluies torrentielles et des inondations. Les températures remarquablement élevées du golfe du Mexique ont pu contribuer à l’intensification rapide de ces phénomènes. Cinq ouragans ont touché terre aux États-Unis, le deuxième plus grand nombre jamais enregistré.

Dans le Pacifique, la saison cyclonique dure toute l'année, avec le cyclone Belal en janvier, qui a frappé La Réunion et Maurice. En Asie, des typhons majeurs ont touché les Philippines, Taïwan, la Chine et le Japon, dont Gaemi en juillet, et Shanshan au Japon en août.

Dans l’Océan Indien, la saison débute en automne. Elle a été marquée par le cyclone Chido qui a frappé Mayotte, le plus violent depuis Kamisy en 1984 et possiblement depuis 1934. Bien que l'intensité de Chido ne soit pas directement attribuée au changement climatique, les eaux chaudes ont contribué à sa force.

Bien que le nombre de phénomènes cycloniques reste stable à l’échelle mondiale ( ils auraient même tendance à être moins fréquents), leur intensité explosive et les quantités massives de précipitations semblent liées au réchauffement climatique.

4. Une année marquée par d’abondantes précipitations et une mousson humide exceptionnelle en Afrique (Sahel, Sahara)…

En 2024, la pluviométrie a été particulièrement intense, surtout au deuxième semestre, dans un contexte de températures mondiales élevées.

Dès avril, des orages violents et inhabituels ont frappé les Émirats arabes unis et Dubaï, où près de 200 mm de pluie sont tombés, l'équivalent de deux ans de précipitations normales. Ces orages ont provoqué des inondations inédites, submergeant la ville et l’aéroport.

À partir de juin, la mousson indienne (Pakistan et Bangladesh) a été particulièrement intense et durable. En juillet et août, elle s’est propagée vers l’est et le sud-est de l’Afrique, atténuant partiellement une sévère sécheresse de la Somalie au Mozambique. En août et septembre, la mousson sahélienne a été plus intense que d’habitude, remontant jusqu’au désert du Sahara, avec des précipitations records observées dans ces zones, les plus importantes depuis au moins 50 ans. Rappelons que le Sahara était verdoyant et rempli de lacs il y a 7 000 ans, dans un climat chaud, et qu’il s’est asséché il y a 3 500 ans lorsque le climat s’est refroidi. Néanmoins, pour savoir si nous assistons à un changement climatique dans ces zones, il faudra attendre 20 à 30 ans pour bénéficier du recul nécessaire.

En septembre, l'Europe centrale a connu des inondations historiques dues à une goutte froide bloquée sur l’Autriche. La tempête Boris a déversé plus de 400 mm de pluie en 72 heures sur le sud de la Pologne, faisant 22 victimes.

La Méditerranée a également subi des pluies exceptionnelles, avec de puissants orages en Italie en septembre. En octobre, une goutte froide sur la péninsule ibérique, associée à une température élevée de la mer, a provoqué des orages diluviens à Valence, qui a été ravagé par l’une des pires catastrophes naturelles de son histoire.

Ces phénomènes pourraient être liés au réchauffement climatique, qui augmente la capacité de l’atmosphère à contenir de l'humidité, entraînant une augmentation des fortes précipitations (+1°C = +7% d'humidité dans l'atmosphère, selon la loi de Clausius-Clapeyron).

5. Une année marquée par quelques exceptions très froides (Scandinavie, Amérique du Sud, Antarctique).

Dans ce contexte planétaire où les anomalies chaudes sont restées largement majoritaires, des exceptions notables sont apparues. Ainsi, après un hiver 2023 considéré comme extrêmement froid, l’Antarctique a connu son cinquième mois de janvier le plus froid. Ces anomalies froides en Antarctique se sont prolongées pendant l’automne austral, avec des records de froid (jusqu’à -75°C) en mai. Cela n’a pas empêché d’observer des records de faible extension de la banquise autour du continent blanc, probablement en raison des courants océaniques.

L’hiver 2023/2024, globalement très doux à l’échelle de l’hémisphère nord, s’est distingué par une forte anomalie froide persistante en Scandinavie. Débutant dès octobre 2023, les grands froids sans dégel se sont maintenus jusqu’en avril avec des records d’extension de banquise sur la mer Baltique. Cet hiver rude pourrait trouver son origine dans le phénomène El Nino, qui était alors en cours, en modifiant les mouvements des masses d’air aux hautes latitudes. Ce fut l’un des hivers les plus froids depuis les années 1990 pour la Fénoscandinavie, avec un record absolu à -44,3°C.

L’Amérique du Sud a connu de très fortes vagues de froid en mai (lors de l’automne austral, en particulier au Chili et en Argentine, alors que le début d’année avait été remarquablement chaud). De l’air très froid en provenance de l’Antarctique s’est propagé à la faveur d’un vortex polaire très affaibli qui a laissé s’échapper l’air froid. Dans le même contexte, l’Australie a subi son cinquième mois d’avril le plus froid en raison de la remontée d’air froid Antarctique. Des records de froid avec du gel ont été relevés au Queensland. En juillet, pendant l’hiver austral, de nouveaux records de froid vieux de 120 ans ont été battus au Queensland avec 0,5°C au nord de cet État. Ces vagues de froid étaient dues à des ondulations du vortex polaire austral.

6. Une faible extension des banquises Arctique et Antarctique

Si la banquise arctique n’a pas atteint son extension minimale record de 2007 et de 2012, elle se situe au 7ème niveau le plus faible, soit un peu moins bas qu’en 2023. On peut y voir une légère stabilisation ces dernières années. En revanche, la situation s'est dégradée en Antarctique, où, après de précédentes années assez stables, avec même parfois des augmentations, le minimum annuel de cette année 2024 a atteint un record de faible extension pendant l’hiver austral. Les océans atteignent des températures records et les eaux qui entourent l’Antarctique ne sont pas épargnées, ce qui limite la croissance de la banquise et accélère sa fonte. Il est donc possible que l’Antarctique entre dans un nouvel « état » où la légère croissance de la banquise de ces dernières décennies laisse sa place à une phase de récession importante.

7- Le coût des catastrophes naturelles en hausse cette année

Le réassureur Swiss Re a estimé que le coût des catastrophes naturelles en 2024 a augmenté de 6%, atteignant 294 milliards d'euros. Cette hausse est en grande partie due aux dégâts causés par les ouragans Hélène et Milton aux États-Unis, ainsi que par les inondations exceptionnelles en Europe et aux Émirats arabes unis. Ces événements, amplifiés par le réchauffement climatique, pourraient se reproduire dans un monde plus chaud.

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