Actualités Météo

Bilan de l’épisode cévenol exceptionnel : jusqu'à 864 mm en Ardèche

Cyril BONNEFOY

Par Cyril BONNEFOY, météorologue
mis à jour le

Dans un contexte déjà très arrosé en ce début d’automne, un nouvel épisode cévenol et de fortes pluies dans le sud se sont mises en place le 16 octobre, puis l'épisode a atteint son pic d’intensité le 17 octobre avec jusqu'à 2 mois et demi de pluie sur les Cévennes. Retour sur cet événement exceptionnel.

Image d'illustration © Adobe Stock

Cet épisode cévenol, qui a débuté mercredi 16 octobre, s’est très nettement renforcé dans la nuit du 16 au 17 octobre. Les cumuls sont alors devenus exceptionnels sur le relief des Cévennes, avec des crues majeures des cours d’eau en aval.

Contexte météorologique

Une dépression est venue se positionner sur la péninsule ibérique en début de semaine, faisant remonter de l’air subtropical chaud sur le pays. Ainsi, le mardi 15 octobre, le thermomètre a grimpé jusqu’à 32°C en Corse et 27°C dans le Puy-de-Dôme, par exemple. Au nord, le pic de chaleur a été atteint le mercredi 16 octobre, avec jusqu’à 26°C à Paris. L’épisode de pluie s’est mis en place sur les Cévennes dès mardi soir et a perduré toute la journée de mercredi avec des intensités fortes, mais assez classiques. C’est surtout dans la nuit de mercredi à jeudi que la situation s’est aggravée, avec le creusement d’une dépression sur le sud-ouest du pays, accélérant les remontées instables de Méditerranée sur les Cévennes et la région PACA, notamment les Alpes-Maritimes.

Un épisode dépassant largement les prévisions des modèles météo

Les premières prévisions de l’événement laissaient entrevoir un épisode assez classique, avec des cumuls estimés autour de 300 à 350 mm, soit un mois de pluie. La situation a pris une tout autre tournure avec des intensités nettement plus fortes. Les modèles météo ont sous-estimé la teneur en vapeur d’eau de l’atmosphère, et donc le potentiel d’eau précipitable. En effet, combinée à l'ancien cyclone tropical Leslie, la dépression était gorgée d’humidité en provenance des tropiques, un peu comme la dépression Kirk une semaine auparavant sur la moitié nord.

Dans la journée de jeudi, le front froid associé à la dépression a accentué le forçage* à l’avant sur les Cévennes et la région PACA. Ainsi, cet épisode a concerné à la fois le relief cévenol, et une grande partie de l’ouest du Massif central, du piémont pyrénéen et de la région PACA. La vaste étendue géographique de cet épisode a provoqué très rapidement des réactions de cours d’eau. Un grand nombre de bassins versants était concerné, comme celui de la Loire et du Gier.

Jusqu’à 2 mois et demi de pluie en 48h sur les Cévennes ardéchoises

Sur l’ensemble de l’épisode, c’est-à-dire du mercredi 16 octobre à la nuit de jeudi à vendredi, les cumuls ont été exceptionnels des Cévennes gardoises aux Cévennes ardéchoises, en passant par la Lozère. Il est ainsi tombé jusqu’à 864 mm à la Croix-de-Bauzon (Ardèche), 694 mm à Mayres (Ardèche) et 562 mm à Villefort (Lozère). Ces lames d’eau représentent deux à deux mois et demi de pluie pour ces stations. Les fortes pluies, associées à des orages, sont remontées en direction du Lyonnais dans la matinée de jeudi et ont concerné le bassin versant de la Loire et du Gier. On a relevé jusqu’à 191 mm à Saint-Sauveur-en-Rue dans la Loire. En parallèle, les Alpes-Maritimes ont essuyé de nombreux orages, à la fois mercredi et jeudi soir. Les cumuls s’élevaient à 149 mm à Mandelieu-la-Napoule et jusqu’à 326 mm à Caussols. Enfin, la partie ouest des Pyrénées a également été concernée avec jusqu’à 175 mm à Mendive (Pyrénées-Atlantiques).

Cumuls totaux de l'épisode pluvieux © La Chaine Météo

Des crues très rapides et dévastatrices

Les premières réactions des cours d’eau se sont produites durant la journée de mercredi, avec également des inondations causées par le ruissellement urbain sous les orages dans les Alpes-Maritimes, comme ci-dessous à Mandelieu-la-Napoule.

C’est surtout jeudi matin que la situation s’est très rapidement aggravée entre l’Ardèche, la Haute-Loire, la Loire et le Rhône, qui ont été placés en alerte rouge par le service d'information Vigicrue. En effet, les ondes de crue se sont répercutées en aval. La ville d'Annonay en Ardèche a particulièrement souffert de ces inondations avec les écoles et les crèches qui ont été évacuées jeudi matin, au regard de la situation hors de contrôle.

La situation est rapidement devenue catastrophique aussi à Rive-de-Gier, par exemple, où les sirènes ont retenti dans l’après-midi pour prévenir la population.

Au plus fort de son pic de crue, le Gier à Givors (Rhône) a atteint la côte de 5,19 m, dépassant largement la crue de novembre 2008 (4,22 m).

Crue du Gier © La Chaine Météo

La Loire a atteint son pic de crue en fin d’après-midi de jeudi, avec une côte de 4,84 m à Bas-en-Basset en Haute-Loire. Cette onde de crue s’est ensuite répercutée vers le barrage de Grangent, dont les vannes ont été ouvertes en début de soirée.

L’onde de crue s’est alors propagée progressivement en aval sur la plaine du Forez. La situation aura été bien moins problématique qu’en décembre 2003 ou novembre 2008 pour ce secteur. Il faut dire que sur les ¾ du département de la Loire, les précipitations étaient beaucoup plus modérées, contrairement aux deux précédents épisodes.

Crue de la Loire © La Chaine Météo

Ces fortes pluies dans le sud, et cet épisode cévenol, ont surpris par leur ampleur. Une de ses particularités notables est son étendue géographique. Cet événement figure parmi les plus intenses de ces 20 dernières années, au même titre que les inondations de 2002, 2008, 2011 et 2014. Il est toutefois à préciser lors de ces années, les conséquences avaient été plus meurtrières et les évènements s’étaient produits entre l’Aude et les Cévennes, pas forcément sur les mêmes départements.

* Dans cette situation, le terme "forçage" fait référence à la façon dont la topographie a influencé les conditions météorologiques. Lorsque des masses d'air rencontrent une montagne, elles sont forcées de s'élever. Ce soulèvement entraîne une diminution de la pression et une baisse de température, ce qui peut provoquer la condensation de l'humidité et donc des précipitations.

Partagez cet article
À lire aussi
logo VIP
  • Un site plus rapide
  • Plus d'info météo
  • Sans pub
  • Accès au TV Live
Articles les plus lus