Canicule et alerte rouge : interview du chef de la prévision à Meteo Consult
Le pays connaît une situation de canicule historique. Les nuits à venir seront étouffantes et la sortie de cette situation sera progressive, comme nous l'explique Pascal Scaviner, chef de la cellule prévision de La Chaîne Météo/ Meteo Consult.
La Chaîne Météo - Vous venez de passer plusieurs départements en alerte rouge, qu’est-ce qui explique cette évolution de votre alerte ?
Pascal Scaviner - C’est une évolution que nous envisagions, mais qui devait être nécessairement confirmée par une bonne fiabilité des prévisions et la prise en compte des dernières informations sur les possibles effets collatéraux (sécheresse, santé, feux de forêts,...). Ce niveau d’alerte rouge pour les canicules est réservé à des événements exceptionnellement intenses et durables. Il convient donc d’être prudent dans la communication et alerter de façon juste. Nos plus récentes analyses ont ainsi confirmé le caractère exceptionnel de cette situation, en raison du nombre de départements concernés (plus de 20 d’ici samedi) et en raison de son intensité (40°C voire plus sur certains départements). De nombreux départements n’avaient jamais été placés en alerte rouge canicule jusqu’à aujourd’hui.
Demain et samedi seront les journées les plus chaudes. Qu’en sera-t-il des nuits ?
Petit rappel tout d’abord sur les très fortes chaleurs les après-midis, car leur niveau expliquera en partie celui des nuits. Les fortes chaleurs que connaissent notamment les régions du sud-ouest, centre-ouest, moyenne vallée du Rhône s’étendront vendredi vers le nord. Les départements entre l’est de la Bretagne et l’île-de-France seront les plus exposés. Le maximum de la canicule sera atteint samedi, avec de très fortes chaleurs qui concerneront 70 % du pays, des températures supérieures à 35°C et des pics jusqu’à 40-42°C.
Les nuits seront de moins en moins supportables, surtout dans le sud-ouest jusqu’à samedi, où la température ne descendra parfois pas en dessous de 22°C en Gironde, Occitanie et surtout en Languedoc avec 26°C, même si cette région n’est pas en alerte rouge. Dans le nord-ouest, vous pourrez encore assez bien supporter la nuit de jeudi à vendredi, même si dans certaines grandes villes il fera 19°C. Dès que vous vous en éloignerez, la température baissera en moyenne de 2 à 3°C. Ce sera beaucoup moins le cas samedi, où les nuits deviendront vraiment tropicales, et surtout dimanche, où des records de températures nocturnes seront nettement battus sur une grande partie du pays, avec parfois 28°C, du jamais vu.
Vous annoncez une fin de la canicule à partir de dimanche. Est-ce que tout le monde en sortira en même temps ?
Non. Une partie du nord-ouest jusqu’à la Nouvelle Aquitaine en sortira dès samedi soir ou au plus tard la nuit suivante. Cette amélioration s’étendra dimanche matin des Ardennes à l’Ile-de-France jusqu’à l’ouest de l’Occitanie. Les régions les plus à l’est pourraient basculer au cours du week-end en alerte rouge avant d’en sortir la nuit suivante.
Est-ce une situation historique et doit-on s’attendre à connaître des situations historiques régulièrement les années après les autres ?
Oui, elle est historique par sa précocité, son intensité et son étendue. On doit également s’attendre à connaitre plus fréquemment ce type d’événements, avec des températures localement plus élevées dépassant les 45°C, en reconnaissant qu’il est difficile de préciser quand.
Que pensez-vous du débat qui anime actuellement les médias sur l’importance de hausser la gravité du ton face à de tels évènements ?
Anticiper le plus tôt possible sur la communication et mieux informer, plutôt que hausser le ton, me parait l’attitude la plus juste. Nous devons être encore plus pédagogues et trouver constamment le moyen d’améliorer l’information de la population face aux conséquences du réchauffement climatique, que ce soit sur la santé, l’économie et tous les autres secteurs impactés. Tout le monde se rend compte que le réchauffement est là. Nous le percevons tous les jours, mais il est nécessaire de faire des rappels. Le militantisme peut participer à cette prise de conscience, encore trop partielle, mais l’information et la pédagogie doivent être nos objectifs principaux pour répondre aux attentes de la population et de toutes celles et tous ceux qui nous font confiance.