Froid et gel cette semaine : une prévision compliquée
Les records de froid atteints cette semaine ont entraîné des dégâts considérables sur les cultures. Le niveau des températures, qui en a surpris plus d'un, a été plus bas que prévu. Avant le retour des gelées dès lundi prochain, nous vous proposons de mieux comprendre ce qui a mené à cette situation plus intense qu'attendu.
Une prévisions soumise aux variations des modèles météo
Comme bien souvent l’explication principale est à rechercher dans l’évolution de la situation générale prévue quelques jours auparavant, mais aussi dans les spécificités géographiques et géologiques de nos régions. Pour mieux comprendre pourquoi ce bas niveau des températures a été difficile à prévoir avec précision, il faut revenir sur la chronologie de cette dégradation.
Le jeudi 1er avril, l’analyse de la situation sur l’Europe montrait bien l’amorce d’un changement radical de temps dès le lundi 5 avril par le nord. La majorité des modèles météorologiques allaient dans le même sens et envisageaient l’arrivée d’une masse d’air froid d’origine arctique dans un flux perturbé d’ouest. Pour la neige en revanche il y avait quelques doutes.
Le 2 avril, l'analyse de la situation en altitude confirmait bien l’arrivée du froid. Des différences commençaient néanmoins à apparaître dans l'analyse de la situation en surface, avec un anticyclone plus proche de l'hexagone, et des pressions sur le nord du pays revues à la hausse, mais sans changement notable dans la prévision du froid et de la neige.
Le 3 avril, un temps plus sec était vu avec des pressions encore plus élevées sur le nord (1025 hPa au lieu de 1015hPa), du froid et beaucoup moins de neige, celle-ci étant renvoyée vers l'Allemagne. Le lendemain, nouvelle analyse, l'anticyclone était vu sur le nord du pays trois jours après, avec pour conséquence un vent quasi nul mais de l’air très froid toujours envisagé en altitude sur le nord (-8°C à 1400m).
Mais le lundi 5 avril, nouveau changement. Sous la poussée d’une dépression à l’ouest du Portugal, l’axe de l’anticyclone a pivoté, entraînant un changement d'orientation du flux d'air sur le nord du pays (d'ouest / sud-est il est passé ouest-est) avec les conséquences suivantes :
Des chutes de neige qui sont restées sur la Belgique, l’Allemagne et la Suisse, épargnant la majorité de l’hexagone. Un ciel dégagé généralisé, favorisant le développement de gelées d’advection parfois intenses durant la nuit. Un air froid généralisé à presque tout le pays.Pour les journées de mardi et mercredi, qui on connu les gelées les plus fortes, le positionnement d'une dorsale anticyclonique (axe de hautes pressions qui prolonge un anticyclone) sur le nord du pays a également compliqué la prévision des températures. En effet, si l'on peut s’attendre à avoir un peu de vent limitant les fortes gelées de part et d’autre d'un tel axe, l’absence de vent augmente le risque de subir de fortes gelées près de celui-ci.
Et ça a été le cas, celles-ci ayant été in fine exceptionnelles pour un début avril. De nombreux records de températures minimales ont ainsi été battus au nord mercredi, mais également sur une partie sud jeudi. Il a gelé avec des températures plus basses que prévu, en moyenne de 2°C. Les gelées, qui ne sont pas rares à cette période de l’année où la végétation s’éveille, sont ainsi devenues fortes et parfois assez extrêmes.
La météo est aussi une affaire de géographie
Outre une situation météo qui a favorisé la baisse des températures, les conditions spécifiques à la typologie de certaines régions ont également joué un rôle. La situation de Romorantin en Sologne en est un exemple. Cette commune se situe à la fois près de zones forestières, sur un sol sableux et dans une cuvette, ce qui a joué dans le niveau des températures. En effet le sol sableux retient assez peu l’humidité accumulée et la rejette dans l’atmosphère, l’air au sol se refroidit d’autant plus. Par ailleurs Romorantin se situe dans une cuvette ce qui favorise l’accumulation du froid quand celui-ci dure plusieurs jours, surtout en l’absence de vent. Cette spécificité géomorphologique peut d'ailleurs s’appliquer à tous les fonds de vallées. La température est ainsi descendue jusqu’à -6,6°C le 6 avril et -6,5°C le 8 avril.
L'ensemble de ces paramètres permet de mieux comprendre ce qui doit être analysé chaque jours afin d'élaborer une prévision, et pourquoi celle-ci s'avère parfois compliquée. Dans ce type de situation, il est donc important de prendre en compte la fiabilité, qui peut parfois vous aider à mieux appréhender la prévision, et être une aide supplémentaire à vos décisions.
Nouveau risque d’assez fortes gelées en début de semaine prochaine
Si le contexte météorologique sera toute autre en début de semaine prochaine, la difficulté reste d'arriver à déceler avec le plus de précision possible si les gelées peuvent être plus fortes que prévu. A cet effet nous surveillons le comportement de l’anticyclone sur les îles britanniques car c’est lui qui va piloter le temps que nous aurons sur la France ces prochains jours. Il suffit qu'il se décale légèrement pour entraîner localement des conditions différentes et accentuer le froid.
Vous l'avez compris la situation à venir n’est pas comparable avec celle que nous venons de connaître. La masse d’air en altitude sera moins froide, et le vent plus présent, ce qui est plutôt une bonne nouvelle pour le secteur agricole. En revanche le risque de fortes gelées ne peut être écarté, surtout mardi, même s'il devrait rester faible et localisé.