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Fortes chaleurs : à quoi peut-on s'attendre en prévision de l'été et des jeux olympiques ?

Regis CREPET

Par Regis CREPET, météorologue
mis à jour le

À 15 jours du début de l’été météorologique, et à deux mois du début des Jeux Olympiques Paris 2024, les risques de fortes chaleurs cet été font déjà transpirer les organisateurs et les athlètes. Pour évaluer ces risques, nous nous sommes penchés sur les statistiques, les données climatiques et les prévisions des modèles météorologiques.

Statistique : la période durant laquelle se dérouleront les JO est la plus soumise au risque de fortes chaleurs

D’emblée, les statistiques météorologiques parlent d’elles-mêmes.

Les 47 épisodes de très fortes chaleurs recensés en France depuis 1947(date de création de l’indicateur thermique national) représentent un total 309 journées réparties entre 14% en juin, 50% en juillet, 36% en août. Cette répartition est due à l’inertie de l’atmosphère, qui restitue la chaleur après la date du solstice (le 21 juin), alors que la durée du jour commence à peine à diminuer. Sur ce total, 50 % d’entre elles (comprenant la canicule historique d'août 2003) se sont produites entre le 12 juillet et le 8 août. Et au sein de cette période, les 24, 25 et 31 juillet, ainsi que les 2, 3 et 4 août sont les dates qui cumulent le plus de journées de fortes chaleurs (8).

La période durant laquelle se dérouleront les Jeux olympiques (26 juillet au 11 août) correspond donc bien à la période de l’année la plus chaude avec un risque statistique d’avoir de fortes chaleurs évalué à 50%.

Les fortes chaleurs connaissent un pic en juillet © La Chaîne Météo

Notre graphique est réalisé sur la base des 47 vagues de chaleurs recensées depuis la création de l’indicateur thermique national en 1947, et tient compte des épisodes les plus sévères (durée et intensité).

Données climatiques : les étés sont de plus en plus chauds et les risques de canicule en augmentation

Dans le contexte du réchauffement climatique, l’hémisphère nord connaît des étés qui se réchauffent, en particulier l’Europe. Les vagues de fortes chaleurs sont plus nombreuses. Au XXème siècle, ces épisodes restaient isolés, survenant une fois tous les 15 à 20 ans. Or, depuis ces 20 dernières années, et à fortiori depuis 2015, des vagues de chaleur sévères se produisent désormais une fois tous les deux ans, parfois plusieurs années de suite, en particulier depuis 2016.

En France métropolitaine, on constate que les étés sont de plus en plus chauds depuis la décennie 1990, avec une augmentation très nette depuis 2015.

Depuis 2000 :

- 63% des étés ont été plus chauds que la normale en France, mais ils représentent 100% depuis 2015.

- 2 étés (2009 et 2021) se sont situés dans les normales (nous avons considéré comme normal l’été lorsqu’il n’a pas dépassé les -0,4°C ou + 0,4°C d’anomalie)

- 7 étés ont été plus frais (inférieurs à -0,5°C d’anomalie)

- 15 étés se sont révélés plus chauds (supérieurs à +0,5°C d’anomalie). Ce sont les étés 2003 et 2022 qui sont, à ce jour, les plus chauds en France.

Concernant les canicules, on en compte désormais en France au moins une chaque année depuis 2016.

Malgré la variabilité climatique qui reste peu prévisible, le contexte penche donc nettement en faveur d’un été qui serait plus chaud que la normale dans la continuité de ces 9 derniers étés, et à l’exception de 2021.

En regardant la répartition des étés depuis 2000, la probabilité que notre été 2024 soit plus chaud que la normale est donc évaluée à 65%.

Modèles de prévision à long terme : un été plus chaud sur la France, mais un risque limité de canicule

Synthèse des prévisions saisonnières © La Chaîne Météo

Outre les statistiques et les données climatiques, nous avons analysé et comparé plusieurs modèles de prévisions à long terme qui couvrent les mois d’été.

Températures : un consensus semble se dégager en faveur d’une saison qui serait plus chaude que les normales, avec des écarts variant de +0,5°C à +1,5°C à l’échelle des trois mois. D’après le modèle C3S (un panel regroupant plusieurs modèles numériques mondiaux), l’anomalie médiane serait de +0,5°C à +1°C. Elle serait légèrement plus élevée pour les modèles américain et anglais, et légèrement moins élevée pour le modèle développé par METEO CONSULT.

Le risque de canicule survenant souvent lorsque l’anomalie de températures prévue pour l’été approche et dépasse la barre des +2°C (1), comme en 2022, la fourchette actuelle envisagée par les différentes modélisations nous placerait donc dans un risque limité de canicule.

Précipitations : le mois de juin pourrait être orageux, tandis que juillet et août seraient nettement plus secs, ce qui pourrait être un facteur accentuant la chaleur. Ce paramètre est important, car les précipitations pourraient limiter le risque de fortes chaleurs.

La modélisation penche donc en faveur d’un été plus chaud que les moyennes, mais limité quant au risque de canicule.

Avec tous ces éléments, le risque de connaître de fortes chaleurs cet été et pendant la période des Jeux olympiques est donc supérieur à 65%. Il y a cependant de nombreux paramètres qui pourraient exacerber ou minimiser ces chiffres :

- Le phénomène La Niña va succéder à l’épisode El Niño. Il entraîne majoritairement des étés chauds sur notre pays, avec cependant une importante fourchette d’anomalie (allant de +0,4°C à +2°C au-dessus des moyennes).

- La température de l’Océan Atlantique élevée pourrait jouer un rôle en permettant la remontée vers la France des anticyclones subtropicaux.

- Si une dépression se forme au large du Portugal ou du Maroc, elle pourra agir comme une pompe à chaleur en propulsant l’air chaud vers la France (une telle évolution n'est prévisible que 8 à 10 jours à l’avance).

- L’humidité des sols, élevée actuellement, pourrait limiter de grandes vagues de chaleur en favorisant l’évaporation, la formation d’orages et la baisse des températures (cette « barrière anti-canicule » a des limites. En 2018, après un printemps et un début d’été très pluvieux, l’été avait été plus chaud de +1,9°C en France).

Les statistiques, la climatologie et les modèles à long terme penchent donc en faveur d’un été qui serait plus chaud que la normale, mais sans caractère aggravant à ce jour. Rappelons que lors des JO de Tokyo à l’été 2021, les fortes chaleurs avaient eu un impact important sur les athlètes et les bénévoles (mais moindre sur le public en raison du confinement lié à la pandémie du Covid). Si cette année la tendance orageuse pourrait limiter de trop fortes chaleurs durables, c’est en revanche le ressenti lourd qui pourrait être particulièrement pénible pour les athlètes et le public.

(1) L’été dernier, caractérisé par une canicule tardive historique, présentait une anomalie de +1,4°C, alors que l’été 2022, caractérisé par plusieurs canicules sévères, était à +2,3°C derrière l’été 2003 (+2,7°C).

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