Crues et inondations : à quand l'amélioration ?
Alors que le Pas-de-Calais a subi plusieurs alertes rouges pour des crues majeures en novembre puis en janvier, le Limousin et la Bourgogne sont à leur tour sous les eaux depuis ce week-end. Avec l’affaiblissement des pluies, la décrue va pouvoir s’amorcer, mais elle sera lente.
Une récurrence de pluie exceptionnelle depuis cet automne
La France était plutôt confrontée aux sécheresses depuis 2022, et la tendance s’est complétement inversée depuis la mi-octobre sur la moitié nord avec le défilé des perturbations. Les cumuls de pluie sont devenus exceptionnels avec des crues majeures jusqu’en janvier, en particulier dans le Pas-de-Calais.
Cet enchainement de perturbations a repris depuis le début du mois de mars, y compris au sud, ce qui est atypique à cette époque de l'année (à l'exception du Roussillon), conduisant à des inondations au sud-est. Les pluies ont été particulièrement abondantes en Limousin, conduisant à une crue majeure de la Vienne ce week-end, puis à des débordements records en Bourgogne.
Pourquoi de telles crues sur ces régions ?
Les inondations représentent le premier risque naturel en France et 80 % du coût des catastrophes naturelles. Une commune sur trois est exposée, dont de grandes agglomérations. Si plusieurs facteurs peuvent provoquer des inondations, la combinaison de fortes pluies durablement bloquées par des reliefs est l’un des paramètres en cause cette année.
Pour le Pas-de-Calais, les collines de l’Artois ont accroché les perturbations incessantes venues de l’ouest. Même principe pour les bassins versants de la Vienne en Limousin, ainsi que pour le Morvan, « château d’eau » de la Bourgogne. Quand les pluies se succèdent à intervalle trop rapproché, les sols saturés ne peuvent plus absorber et retenir les eaux, même si les nappes phréatiques sous-jacentes ne sont pas remplies. Lorsqu'elles le sont, les conséquences hydrologiques sont encore plus importantes.
La Bourgogne : une configuration particulière
Le cas de la Bourgogne est typique du rôle des reliefs dans le principe du déclenchement des crues. Le Morvan est un relief massif culminant à 900 m d’altitude dans la région d’Autun (Saône-Et-Loire). De ces collines granitiques naissent de nombreux cours d’eau : l’Yonne, l’Armançon, le Loing, le Serein, la Seine (proche de sa source en Haute-Marne), ainsi que l’Ouche et les affluents de la Saône en versant sud (dijonnais). Les montagnes du Morvan sont striées de cuvettes marneuses imperméables et humides, de telle sorte que les eaux de pluie s’y accumulent. Même sur ces hauts plateaux, les petits ruisseaux ont tous débordé, alimentant ensuite les rivières qui convergent vers le bassin de la Seine et de la Saône.
Une situation météorologique remarquable
Cumuls de pluie depuis le vendredi 29 mars © La Chaîne Météo
Outre ces spécificités géographiques, la situation météorologique du week-end dernier a généré des cumuls de pluie remarquables, comme en Limousin pour le bassin versant de la Vienne et de ses affluents. Notre carte montre bien les cumuls de pluie maximums sur ces zones de reliefs. Dans un flux humide remontant du sud, le Morvan a bloqué les perturbations et les pluies se sont durablement accrochées. Il s’agit, comme bien souvent, d’un événement multifactoriel.
Le pic de crue se stabilise tout en se propageant
Crue de l'Armançon ( Yonne) © La Chaîne Météo
Ce mercredi à la mi-journée, les pics de crue ont tous été atteints avec des niveaux d’eau qui commençaient à baisser rapidement, notamment pour le versant de la Saône-et-Loire et le dijonnais (l’Ouche). En versant nord, c’est-à dire vers l’Ile-de-France, la situation reste plus complexe, particulièrement pour l’Armançon aval. En effet, le niveau maximal devrait passer dans la nuit de mercredi à jeudi, en dépassant le dernier pic historique de juin 2016, lors des crues majeures du bassin de la Seine qui avaient inondé la région parisienne. Le maximum historique de mai 2013 pourrait être approché.
L’Armançon va se déverser dans l’Yonne, laquelle commence à monter rapidement avec un pic prévu jeudi, sans atteindre des seuils records. La Marne amont est également en crue, et la baisse devrait se mettre en place jeudi également. L'ensemble de ces cours d’eau pourrait faire monter la Seine, jusqu’en région parisienne, d'ici à ce week-end, ce qui pourrait l'amener à être placé en niveau jaune crue par l’organisme « Vigicrue ». La répétition de la cérémonie d'ouverture des JO2024 prévue le 8 avril a d'ailleurs été reportée au 27 mai en raison cette crue.
L’évolution ultérieure dépendra des nouvelles pluies
Cumuls de pluie prévus jusqu'à lundi © La Chaîne Météo
Si les pluies s’étaient poursuivies, la situation en Bourgogne aurait pu devenir encore plus préoccupante avec d’éventuelles répercussions jusqu’en Ile-de-France. Les ondes de crue se seraient alors propagées vers Paris, comme en juin 2016. Ce ne sera pas le cas, les quelques averses orageuses jeudi ne seront pas suffisantes. Par la suite, un temps sec et chaud va s’installer jusqu’au week-end, avant un nouveau défilé des perturbations qui pourrait reprendre la semaine prochaine.