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Recul des côtes : nouvelles menaces avec les grandes marées ?

Regis CREPET

Par Regis CREPET, météorologue
mis à jour le

La succession de tempêtes sur la côte Atlantique depuis fin décembre, conjuguées aux grandes marées, a occasionné de gros dégats au littoral. Les infrastructures balnéaires ont souffert, ainsi que les plages et les dunes. Par endroit, le "trait de côte " (c'est à dire la limite où s'avance la marée haute) a reculé de 3 à 10 mètres en...

La succession de tempêtes sur la côte Atlantique depuis fin décembre, conjuguées aux grandes marées, a occasionné de gros dégats au littoral. Les infrastructures balnéaires ont souffert, ainsi que les plages et les dunes. Par endroit, le "trait de côte " (c'est à dire la limite où s'avance la marée haute) a reculé de 3 à 10 mètres en Aquitaine, selon un rapport élaboré par le BRGM et l'Observatoire de la Côte Aquitaine. Ce recul spectaculaire est un processus naturel mais dont la rapidité reste exceptionnelle cette année. L'inquiétude reste de mise au vu des prochaines grandes marées qui se profilent à la fin du mois.


L'érosion littorale est un phénomène naturel bien connu des géographes. Sous l'action des tempêtes hivernales et du déferlement des vagues, les plages subissent en hiver une érosion plus ou moins marquée selon les années. Mais il est normal que les plages soient rabotées. Lorsque les vagues montent à l'assaut des dunes, elles peuvent être sapées par la base. Ce processus est similaire mais beaucoup plus lent sur les côtes à falaises. Par la suite, lors du retour au calme au printemps et en été, les plages ont tendance à " s'engraisser " avec le retour progressif du sable (ou des galets) qui s'étaient retirés sous le niveau de la mer. Au final, c'est le bilan entre l'ablation et l'engraissement qui permet de connaître le taux d'érosion du littoral: à ce sujet, nos côtes françaises sont en bilan plutôt négatif, c'est à dire qu'elles s'érodent plus qu'elles s'engraissent, sauf dans certaines baies (Mont St Michel, Baie de Somme, Bassin d'Arcachon, estuaire de la Loire...) : voir notre infographie ci-dessus. Les côtes rocheuses, plus solides, restent stables.


Une année exceptionnelle, des vagues monstrueuses


De très grosses dépressions ont circulé sur l'Atlantique depuis la fin décembre : plus d'une vingtaine à ce jour, dont certaines colossales avec des pressions descendant à 940 hPa entre les Açores et l'Irlande. On se souvient d'Hercules, ou encore de Qumeira et de Nadjia : sans pour autant provoquer de tempêtes exceptionnelles en France, leur énergie a engendré des trains de houle monstrueux (de 14 à 20 m) se propageant jusque sur les côtes portugaises et marocaines.

Dans ce contexte, la côte Aquitaine a été frappé à plusieurs reprises par de puissants trains de houle, conjugués à la surélévation de la mer lors des grandes marées. Cette combinaison a véritbalement fragilisé le trait de côte : le sable a été emporté vers le large par des courants de retour sous-marin, de telle sorte que les fronts de mer ont été rejoint par les vagues. Certaines stations telles que Lacanau ou Mimizan ont même vu les vagues monter à l'assaut du cordon dunaire de plusieurs mètres de haut et redescendre sur l'autre versant. Sans parler de la fragilisation des constructions littorales (campings, digues et constructions).


Inquiétude pour les prochaines grandes marées


Le rapport de l'Observatoire du littoral Aquitain et du BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) (1) est "inquiet " pour la prochaine période des grandes marées, entre le 28 février et le 3 mars; elles "risquent de poursuivre l’érosion des cordons dunaires, surtout si elles sont combinées à des conditions météo marines défavorables. Les périodes autour du 2 mars (coefficients 114 / 115) sont en particulier à craindre. Les fortes quantités de sables prélevées au niveau des plages lors des derniers évènements fragilisent les pieds de dunes qui seront plus facilement accessibles aux vagues en cas de conditions défavorables".

A ce jour, les conditions météorologiques attendues par Météo-Consult pour le week-end des grandes marées sont sous étroites surveillances : un système dépressionnaire pourrait entrainer des vents forts venant de l'ouest à nord-ouest, mais sans commune mesure avec les précédentes tempêtes. Mais avec de tels coefficients, un train de houle habituel arrivant sur un littoral déjà bien fragilisé pourrait occasionner de nouvelles submersions. Quoiqu'il en soit, le spectacle des fortes vagues à la côte pourrait être encore une fois spectaculaire...

(1) Mallet C., Garnier C., Maugard F., Millescamps B., Mugica J., Nahon A., Rosebery D., avec la collaboration de Bassibey A., Bouchet C., Capdeville B., Chartier E., Devoti J., Duport B., Maia J., Perrocheau E., Rambaud D., Raynaud V., Robert D. (2014) – Compte-rendu des observations post-tempêtes sur le littoral aquitain (décembre 2013 – janvier 2014). Rapport final. BRGM/RP-63182-FR, 81 p., 109 fig., 1 ann.

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