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Kirk : pourquoi la tempête sera moins forte que prévu ?

Regis CREPET

Par Regis CREPET, météorologue
mis à jour le

Au passage de l'ex ouragan Kirk sur la France dans la nuit de mercredi à jeudi, la force des vents est revue à la baisse par les derniers calculs numériques, ce qui est une bonne nouvelle. Mais comment expliquer une telle volatilité des prévisions ?

Le passage de l’ex ouragan Kirk sur la France reste prévu entre mercredi après-midi et jeudi matin, rentrant par la côte aquitaine et ressortant par le Luxembourg. Si cette trajectoire semble fiabilisée, la prévision de la force des vents a connu une certaine volatilité, ce qui interroge. Voici quelques explications.

La difficulté des modèles à prévoir les anciens phénomènes tropicaux.

Les phénomènes tropicaux présentent des caractéristiques atmosphériques différentes des latitudes tempérées (direction des vents, structure de l’atmosphère, température et vapeur d’eau, ainsi que la température de la mer). Ainsi, les modèles numériques peuvent prévoir leur comportement sur leurs zones habituelles, mais dès que ces systèmes remontent vers des latitudes tempérées, ils rencontrent un environnement différent et les calculs deviennent complexes. Il peut en résulter des prévisions aggravantes concernant la force des vents par exemple.

On peut penser que les modèles ont eu du mal à appréhender le comportement de Kirk. Si sa trajectoire s’est peu à peu fiabilisée, la force des vents s’enroulant autour du centre dépressionnaire était surestimée.

Kirk n’a pas rencontré de conditions propices au maintien de sa puissance

- Des eaux plus fraiches et de l’air frais

Pour qu’un ancien phénomène cyclonique se maintienne, il faut qu’il évolue dans un environnement favorable, des eaux chaudes par exemple. Or, après avoir circulé sur des eaux atlantiques plus chaudes que la moyenne, Kirk va désormais passer sur des eaux plus fraiches dans le golfe de Gascogne. Cela aura pour conséquence de lui faire perdre assez rapidement ses caractéristiques extra tropicales. D'autre part, il rencontre une descente d’air frais venant de l’Atlantique Nord, ce qui concourt aussi à son affaiblissement. Il évolue alors en dépression des latitudes tempérées.

- Une pression atmosphérique moins creuse que prévu

Kirk devrait afficher une pression de 985 hPa, ce qui est moins bas que prévu © La Chaine Météo

Les ouragans sont caractérisés par de basses pressions en leur centre. Plus la pression est basse, plus le différentiel avec les zones alentour est fort et plus les vents sont violents (on parle de « gradient de pression »). Compte tenu des éléments évoqués ci-dessus, la pression remonte en son centre à mesure qu’il progresse vers la France. Ce mardi, la pression de Kirk remontait à 976 hPa., et prévue à 985 hPa en abordant la France ce mercredi. Il s’agit certes d’une pression très basse, atypique pour cette époque de l’année, mais moins basse que prévu (certains modèles envisageaient, dimanche, une pression proche de 978 hpa en abordant la France. Il y aura donc entre 5 et 10 hPa de plus lorsque la dépression Kirk traversera notre pays : cela suffit à diminuer la force des vents, et les modèles se recalent en fonction de ces nouveaux paramètres.

- L’effet de la Corogne

Avec une trajectoire passant plus au sud que prévu initialement (les premiers modèles envisageaient une trajectoire passant au nord-ouest dans un premier temps), Kirk se cognera contre la pointe de la Corogne (nord-ouest de l’Espagne). Ce contact aura probablement tendance à déstructurer un peu le cœur dépressionnaire et à « couper l’élan » des vents en direction de la France. Autre conséquence directe, la houle cyclonique aura majoritairement tendance à descendre vers les côtes portugaises, même si le golfe de Gascogne subira une mer démontée (creux de 6 m).

- Pas d’interaction avec le Jet stream

Le jet stream propulse Kirk vers l'Europe mais sa force est modérée © La Chaine Météo

Ce paramètre est peut-être le plus important évitant que Kirk ne devienne une « bombe météorologique ». Le jet stream, qui était rapide en ce début de semaine, a aidé Kirk à se diriger vers l’Europe. Mais il ralentit en ce milieu de semaine. Kirk va donc évoluer sans être renforcé par le courant jet. Dans certaines circonstances, l’interaction entre un jet-stream très rapide (jusqu'à 400 km/h) et les dépressions de surface ont causé des catastrophes, telles les tempêtes de décembre 1999 ou « l’ouragan du 15 octobre 1987 ». Ce ne sera pas le cas cette fois.

Des incertitudes subsistent encore

Moins de 36 heures avant l’arrivée du centre dépressionnaire sur les côtes aquitaines, les prévisions peuvent encore évoluer. La trajectoire pourrait descendre encore davantage vers le sud, et l’arrivée de l’air froid qui va s’engouffrer après le passage de Kirk pourrait avoir un effet dynamisant, ce qui renforcerait alors la force des vents, notamment dans les terres. La mesure de la pression atmosphérique et la situation précise de son centre mercredi à la mi-journée apportera les dernières réponses à ces questions.

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