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Sécheresse 2019 : une situation de plus en plus inquiétante

Regis CREPET

Par Regis CREPET, météorologue
mis à jour le

La sécheresse gagne du terrain avec désormais 67 départements concernés par des restrictions d'usage de l'eau. Les nappes phréatiques sont à un niveau inférieur à la normale sur 60% du territoire et l'absence de pluies depuis un mois sur de nombreuses régions entraîne une sécheresse de surface très marquée.

Depuis la mi-juin, de nombreuses régions de France n'ont pas reçu de pluies significatives (cumul >5mm), conduisant à un état de sécheresse superficielle de plus en plus marqué et visible. La période de canicule de la fin juin et les épisodes de vent n'ont fait qu'accentuer cette sécheresse qui continue de s'aggraver avec la persistance d'un temps durablement sec sur la majeure partie du pays.

© La Chaîne Météo

Quelques ondées orageuses ont pu donner des cumuls de pluie significatifs par endroits sur la moitié sud mais les pluies ont été très aléatoires. Le sud et l'est du Massif-Central, le nord de la Corse sont les zones qui ont reçu le plus de précipitations ces derniers jours mais il faut relativiser car ce sont des pluies intenses qui ruissellent vite et ne profitent pas pleinement à la nature.

Un déficit pluviométrique chronique depuis l'été dernier

Les précipitations sont déficitaires sur la France depuis l'été dernier à quelques exceptions près. L'été 2018 a été particulièrement chaud et sec et la sécheresse s'est poursuivie jusqu'en octobre sur pas mal de régions. Si le mois de novembre a été correctement arrosé, cette situation n'a pas duré avec un hiver 2018-2019 pas assez pluvieux et un déficit pluviométrique de l'ordre de 21% sur la France.

© La Chaîne Météo

Au printemps, on a observé un déficit de pluie de 16% à l'échelle de la France. Si le mois de mai a connu une pluviométrie proche de la normale avec des températures déficitaires, la situation hydrologique s'est nettement dégradé depuis la mi-juin avec un temps durablement sec et une période de canicule à la fin du mois de juin. Depuis le début de l'été météorologique (1er juin) le déficit de pluie approche 40% à l'échelle nationale.

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Des nappes phréatiques en baisse rapide et déficitaires sur 60% du territoire

Les nappes phréatiques sont orientées à la baisse sur la majeure partie du pays ce qui n'a rien d'étonnant puisqu'à cette époque de l'année, les précipitations ne servent pas à remplir les nappes mais sont utilisées par la végétation. Cette baisse du niveau des nappes est néanmoins très rapide car les précipitations sont très rares depuis quelques semaines d'où des besoins en eau accrus dans le domaine agricole mais auquel s'ajoute une pression en eau importante dans les régions touristiques.

© La Chaîne Météo

Des conséquences déjà bien visibles en ce début d'été 2019

La période de canicule exceptionnelle de la fin du mois de juin et l'absence de pluies depuis la mi-juin sur de nombreuses régions ont des répercutions importantes dans le domaine agricoles. On observe des baisses de rendements de l'ordre de 5 à 10% sur les récoltes en céréales. Chez les éleveurs, les prairies sont déssechées dans de nombreuses régions et il faut parfois puiser dans les fourrages d'hiver pour pallier au manque d'herbe fraîche.

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Si la vigne résiste bien face aux fortes chaleur et à la sécheresse, la canicule de la fin juin 2019 a été particulièrement sévère. En Languedoc, les records de chaleurs ont été pulvérisés avec jusqu'à 45,9°C enregistré à Gaillargues-le-Montueux. Cet air brûlant associé au mistral a eu un effet de sèche-cheveu et des conséquences importantes sur les vignobles. Des feuilles et des raisins ont été littéralement carbonisés, ce qui n'avait jamais été vu de mémoire de viticulteurs dans la région. Selon la Chambre d'agriculture du Gard, 2500 ha ont été impactés de 20 à 80%. Dans l'est du département de l'Hérault, 7800 ha ont été impactés de 20 à 100% avec une projection à 10000 ha lorsque tous les sinistrés se seront fait connaître. La précocité de cette vague de chaleur après un printemps un peu frais explique aussi l'étendue des dégâts car les raisins étaient tout juste formés et plus fragiles qu'en plein été lorsqu'ils approchent de la maturité.

Autre conséquence de la sécheresse, le niveau des cours d'eau très bas sur certaines rivières, notamment sur le bassin de la Loire et de ses affluents. Dans l'Indre, un arrêté préfectoral a été pris pour interdire la pêche à la truite à partir du 22 juillet, sur l'ensemble des cours d'eau du département. Même dans le nord-est, les interdictions de pêcher commencent à tomber comme dans le département de la Meuse où la préfecture interdit la pêche sur les petits cours d'eau jusqu'au 18 septembre. Comme l'année dernière, certains tronçons du Doubs se retrouvent à sec et de nombreuses mesures d'interdictions de la pêche sont mises en places dans les secteurs où le niveau du cours d'eau est trop bas pour permettre cette activité.

Enfin, les sécheresses et les vagues de chaleur à répétition que nous connaissons depuis quelques années ont un impact important sur nos forêts. On observe sur les forêts de connifères des Vosges et du Jura des phénomène de rougeoiment et de déssechement lié au déficit hydrique important associé à des périodes de fortes chaleurs plus nombreuses. Dans le Haut-Rhin, pas moins de 100000 m3 de sapins ont dépéri au cours des derniers mois. Sur les arbres fragilisés, on assiste aussi à la prolifération d'insectes nuisibles tels que les scolytes, des coléoptères qui creusent des tunnels sous l'écorce des résineux et finit par entraîner la mort des résineux.

Un mois sans pluie à Paris : a t-on déjà connu une si longue absence de pluie ?

La sécheresse que nous connaissons depuis la mi-juin est particulièrement marquée sur les régions du nord-ouest, le centre et le Bassin parisien. A Paris, il faut remonter au 20 juin pour retrouver la moindre précipitation. On observe donc une période de 29 jours sans la moindre goutte d'eau ce qui est exceptionnel mais pas inédit à cette période de l'année. En 1976, on n'avait pas observé la moindre pluie entre le 2 juin et le 11 juillet soit 40 jours consécutifs dans pluie. Plus près de nous, on a observé durablement sèches en 2015 (1 mm entre le 1er juin et le 7 juillet) et 2018 (5 mm entre le 12 juin et le 26 juillet).

© La Chaîne Météo

La sécheresse va-telle marquer le pas ces prochaines semaines ?

Au cours de ces prochains jours, les précipitations resteront rares sur notre pays. Seules quelques ondées sont attendues dans le nord-ouest au passage de perturbations atténuées. A noter aussi quelques orages localisés samedi en fin de journée dans l'est. Rien qui ne remette en cause une sécheresse s'aggravant de jour en jour...Le nouvel épisode de fortes chaleurs attendu entre lundi et mercredi prochain accentuera encore la situation. L'échéance est encore lointaine mais une dégradation pluvio-orageuse pourrait apporter un répit en fin de semaine prochaine ; cette tendance sera à confirmer ces prochains jours.

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