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Hiver 2015 - 2016 : des incertitudes qui s'accentuent

Regis CREPET

Par Regis CREPET, météorologue
mis à jour le

Les prévisions saisonnières de Météo Consult envisagent un hiver globalement doux et humide sur la France, qui pourrait se refroidir éventuellement en février - mars. Quels sont les paramètres qui déterminent cette tendance à long terme? L'hiver pourrait-il être plus froid que prévu? Éléments de réponse avec un ajustement mis à jour ce 20 septembre.

Les prévisions saisonnières de Météo Consult envisageaient une tendance plus douce et plus humide que les moyennes en France pour l'automne et l'hiver. On pourrait donc assister à un scénario proche de celui de l'hiver 2013 - 2014, qui avait été marqué par de fortes pluies, des coups de vent et des inondations. En montagne, cela se traduirait par d'abondantes chutes de neige, mais seulement en altitude, au-dessus de 2000 m en moyenne. Cette neige est particulièrement attendue cet hiver, non seulement pour la saison de ski, mais aussi pour renflouer les glaciers qui ont bien souffert de l'été caniculaire.

Mais les incertitudes, déjà évoquées dans l'actualisation du 10 septembre, sont bien présentes notamment au vu de l'évolution globale de ce mois de septembre. Même s'il serait prématuré de modifier la tendance saisonnière, cette dérive nous incite à la plus grande méfiance vis à vis de notre hiver. Dans un premier temps, nous restons confiant sur la perspective d'un hiver globalement doux dans son ensemble, mais qui pourrait présenter davantage d'épiphénomènes (événements changeants) que ces deux dernières années (risque de tempêtes et de coups de froid passagers).

De même, il semblerait que l'hiver soit partagé en deux parties distinctes : la période novembre - janvier majoritairement douce, tandis que février - mars pourraient être assez froids.

Tout cela nous permet de dire que l'hiver sera peut-être moins doux que prévu initialement, rejoignant alors davantage les normes saisonnières ("hiver standard") mais très agité.

La méthodologie

Outre les indices évoqués ci-dessous, nous avons effectué une étude statistique reprenant les années où les scénarios météo ressemblaient à l'été 2015 (voir tableau), mettant en parallèle le phénomène "El Nino" et son inverse, la "Nina" (davantage propice aux hivers froids). On ne constate pas de véritable cohérence : toutes les évolutions sont possibles, y compris en année El Nino comme actuellement. La statistique n'apporte donc pas d'aide significative dans la prévision.

© La Chaîne Météo

Ce "scénario majoritaire" ne tient pas compte des petites fluctuations intermédiaires : des coups de fraîcheur et de neige à basse altitude sont possibles, mais indétectables à cette échéance. Ce qui semble possible en revanche, c'est la perspective d'un temps changement de configuration en fin d'hiver, avec le retour de conditions plus froides pour la période février - mars, bien que la fiabilité de cette tendance lointaine soit très faible.

Les centres d’action :

A partir d’octobre, selon une chronologie à affiner, les perturbations atlantiques commencent à circuler au niveau des îles britanniques, affectant la moitié nord de la France. Cette configuration, marquée par un flux de sud-ouest récurrent, devrait caractériser également le mois de novembre. En parallèle, ces perturbations sont susceptibles de provoquer des "épisodes cévenols" dans nos régions méditerranéennes, lorsque les vents remontent du sud. La température toujours très élevée de la Méditerranée est un facteur de risque aggravant non négligeable, bien que n’étant pas le seul élément à prendre en compte pour l’évaluation du risque.

Saison cyclonique : concernant l'Atlantique Nord, la saison cyclonique en cours devrait rester très faible, inférieure de 50 à 60% à la moyenne conformément aux prévisions initiales. Elle serait même plus faible que l'année dernière. Les prévisions envisagent la formation de 5 ouragans (dont un majeur) et 11 tempêtes tropicales. La configuration globale n'est pas propice au développement des phénomènes tropicaux, qui restent le plus souvent au stade de tempête. Cela n'exclut pas le risque de fortes pluies orageuses comme ce fut le cas avec Danny et Erika début septembre.

Concernant l'océan Pacifique Nord-Ouest, les prévisions sont très pessimistes avec une saison hyperactive (40% supérieure à la moyenne), qui pourrait être la plus virulente depuis 2004 voire 1965. Comme l'année dernière, le triangle entre les Philippines, Taïwan et le sud du Japon est le plus menacé.

El Nino : le phénomène a pris une ampleur remarquable, avec une anomalie thermique du Pacifique Est comparable au grand El Nino de 1997 - 1998. L’une des principales conséquences du phénomène El Nino dans l’océan Pacifique est de maintenir des températures planétaires globalement élevées, mais l’impact sur l’Europe est encore mal cerné. Il est donc délicat d’en tirer un lien de causalité. De même, les hivers en période El Nino ne sont pas systématiquement doux en Europe : dans environ 40% des cas, les hivers ont même été rigoureux, ce qui ne permet pas d’élaborer une prévision uniquement basée sur ces statistiques. Néanmoins, le contexte globalement chaud qui règne cette année en Europe de l’ouest semble devoir se maintenir jusqu’en janvier voire février 2016.

A noter que l'actuel Nino 2015 n'est pas plus intense que celui de 1997 - 1998, qui fait référence jusqu'à présent.

© La Chaîne Météo

L’oscillation Nord Atlantique (NAO) :

A noter : les eaux de l’Atlantique nord (au sud du Groenland et vers l’Islande) restent anormalement froides depuis des mois, et cette anomalie va persister : son influence sur l’Europe de l’ouest fait débat : elle pourrait accélérer la circulation des dépressions, ou, au contraire, maintenir un anticyclone sur l’océan : selon la position de cet anticyclone (plus au nord ou davantage au sud), le flux pourrait basculer davantage au secteur nord, apportant des masses d’air plus froid vers la France (auquel cas l’hiver serait plus froid que prévu) : on parle alors d’oscillation nord Atlantique (NAO) en phase négative : cette perspective reste plausible, mais à ce jour non modélisé (quelques modèles calculent une anomalie froide en Europe de l'ouest, notamment le modèle Japonais).

Les cycles naturels

La variabilité naturelle est une caractéristique du climat, notamment dans nos latitudes dites "tempérées", ce qui rend d'autant plus difficile l'élaboration des prévisions saisonnières. Ainsi, l'occurrence d'hivers froids et d'hivers doux sur l'Europe semble obéir à des cycles dont les mécanismes sont complexes. Il serait simpliste de dire que les hivers rigoureux surviennent tous les 30 ans par exemple, sachant que d'autres interactions entrent en jeu. De même, les années où se produit le phénomène El Nino sont des années "chaudes" au niveau planétaire, mais il n'y a pas de corrélation statistique forte avec les hivers européens : certaines études tentent de démontrer des liens, mais on constate que lors des années "El Nino", 40% des hivers sont froids (dont parfois de grands hivers comme 1963), le reste étant partagé entre "doux" et "normal".

La France a renoué avec des hivers doux et humides depuis seulement 2 ans, alors que la période 2005 - 2013 était redevenue plus froide (à peu près au niveau de la période 1977 - 1983). Selon toute vraisemblance, ce cycle devrait encore se prolonger pour l'hiver 2015 - 2016, malgré une légère incertitude pour la fin de la saison. Le retour des hivers plus froids devrait attendre 2016 - 2017.

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