Tempête de Bora : 206 km/h en Croatie
Les tempêtes méditerranéennes peuvent être redoutables : cette fin de semaine l’a encore démontré sous le souffle de la bora, le furieux grand frère de notre mistral.
Sous l'effet de la dépression Italienne les rafales ont déjà atteint les 206 km/h en Croatie. Le cœur de la dépression, s’est creusé à 992 hPa en Mer Tyrrhénienne, le long de la côte Italienne. Mais c'est au niveau de la Croatie que les tempêtes atteignent des paroxysmes insoupçonnés, sous l'influence de la bora, ce vent froid et brutal qui descend des montagnes de l'arrière-pays. C'est pourquoi la Croatie a été placée depuis jeudi en alerte rouge au vent.
Un appel d'air extrêmement violent
La bora est parfois comparée à notre mistral ou au meltem grec. «Il est vrai que c'est un vent froid venant de l'intérieur du continent, confirme Régis Crépet, prévisionniste pour Météoconsult. Mais son mécanisme est un peu différent» Pour que la bora se déclenche, il faut qu'une dépression se creuse dans les parages de l'Italie et qu'une masse d'air froide descende de Russie vers les Balkans. «Cette combinaison engendre une accélération des vents de nord-est, froids et denses, qui viennent s'engouffrer vers le coeur dépressionnaire», précise Régis Crépet. Rappelons que les masses d'air tournent dans le sens inverse des aiguilles d'une montre autour d'une dépression.
La formation de la bora est encore amplifiée par un autre paramètre: les montagnes qui bordent la côte dalmate. Cette chaîne de montagnes, surnommée les «Alpes Dinariques», s'étend du nord au sud, de la Slovénie et de l'arrière-pays de Trieste (à la frontière avec l'Italie) jusqu'au Monténégro en longeant la Croatie (Dubrovnik). «Lorsque le vent froid arrive depuis la Russie via la Hongrie et la Roumanie, explique le météorologue, l'air est obligé de passer par-dessus ces montagnes, puis il redescend à pleine puissance de l'autre côté, sur le littoral. Il s'agit d'un vent descendant, dont la force est renforcée par la compression.» C'est le principe des vents catabatiques. La bora est l'un des vents régionaux les plus forts au monde et le plus puissant du bassin méditerranéen.
© Marin Pitton Photography
Des rafales glaciales
Ainsi, deux ou trois fois par an, un «coup de bora» se déclenche sur ce littoral Adriatique, lorsqu'une pulsion d'air froid arrive de l'Europe centrale. Sa puissance n'est pas toujours aussi extrême mais cette fois-ci, les rafales ont atteint 206 km/h en Croatie. Le record de bora serait de 304 km/h, fin décembre 2003. La ville portuaire de Trieste, à la frontière entre l'Italie et la Slovénie, avait connu des rafales à 188 km/h en 2010 et 176 km/h en mars 2011. Sous son effet, la mer se couvre d'écume qui s'envole littéralement en embruns, et des creux de 5 mètres se creusent dans les détroits ; mais s'agissant d'un vent de terre, les vagues au littoral ne déferlent pas avec la puissance que l'on pourrait imaginer dans une telle situation extrême. Enfin, ajoutons qu'il s'agit d'un vent froid avec des températures souvent proches de 0°C et accompagné d'orages de grêle et même de tempêtes de neige: dans ces conditions, la température ressentie peut s'apparenter à du -25°C.
Tout comme notre mistral, un coup de bora dure entre un et trois jours, avant le retour d'un temps calme et parfaitement ensoleillé. On ne le dira jamais assez : la Méditerranée est extrêmement capricieuse.